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Selectorama : Romain de Ferron

Romain / Photo : Lucien Rousset
Romain / Photo : Lucien Rousset
J’avais posé des questions à Romain il y a pas mal de temps à propos de son fanzine Fond de caisse pour Section 26. Je ne me doutais pas qu’il était un musicien prolifique et qu’en plus de ses habitudes d’édition souterraine, il multipliait les identités et les aventures stylistiques sous des noms plus étranges les uns des autres, seul ou en groupe (Omerta, Balladur). Avec Ravi, sorti récemment sur le label belge Kraak, il explore en huit instrumentaux des paysages rêveurs qu’on dirait sortis d’un gros ordi synthé type Fairlight. Pour un cinquantenaire comme ouam, c’est du pain béni parce que ces sonorités sont pleines de charges mélancoliques – elles me renvoient aux sons qu’on entendait à la télé dans des programmes documentaires ou des reportages sportifs. Je me retrouve catapulté en robe de chambre dans le salon familial, baigné de lumière bleue cathodique, blotti un samedi soir d’hiver. Alors bien sûr, chacun aura sa vision des choses, selon son âge, mais les sons sont très beaux, amples et ces mélodies peuvent simplement accompagner vos vagues à l’âme du dimanche matin quand vous rentrez d’une fête ou du dimanche soir, avant de retrouver le boulot. Du blues du XXe siècle, quoi. Romain nous envoie huit musiques qu’il écoute en ce moment, autant de clés à sa cassette magique (comme on dirait d’une Dictée Texas Instrument).

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Deacon Blue, Raintown (CBS, 1987)

Ils étaient loaded, bien avant Primal Scream, disons cinq bonnes années, et vu le clip, on ne sait pas trop à quoi ils tournaient, mais ils planaient bien haut. Et même que le chanteur avait un petit chapeau, le même que Stuart Murdoch de Belle & Sebastian s’est mis à porter quelques années plus tard, avec plus de classe, on dira. Ils venaient de Glasgow, comment en eut-il été autrement ? Ils venaient de cette ville d’Écosse, qu’ils surnommaient Raintown, ville de tous les fantasmes du petit gars de seize ans de l’Est de la France que j’étais. Je m’étais choisi ce coin de paradis comme d’autres avaient pointé, sur la carte de leur désir, Tahiti ou Bora-Bora. Ou plutôt, c’est cette ville qui m’avait choisi. Continuer la lecture de « Deacon Blue, Raintown (CBS, 1987) »

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« Le monde de demain » de Hélier Cisterne et Katell Quillévéré

Le Monde de Demain : Anthony Bajon et Melvin Boomer
Le Monde de Demain : Anthony Bajon et Melvin Boomer

« Ce qui compte, c’est pas d’être prêts, c’est d’être là »

Filmer la musique, épisode 2 (ou 3, si on compte le texte sur le merveilleux On ne va pas se quitter comme ça de Jean-Louis Comolli pour les amis de Musique Journal) : après mes réflexions sur le documentaire La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est, j’ai par hasard enchaîné sur Le monde de demain d’Hélier Cisterne et Katell Quillévéré, qui passe en ce moment sur Arte. Six épisodes de moins d’une heure chacun racontent les débuts du duo vénère et de leur entourage plus ou moins proche (Lady V, Assassin, Dee Nasty…) dans un style relativement modeste avec tout de même de belles reconstitutions de ferveur collective (les soirées notamment, on y reviendra) et de sacrées performances des acteurs, dans les moments de danse et de musique. Continuer la lecture de « « Le monde de demain » de Hélier Cisterne et Katell Quillévéré »

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Avant-première : « L’amour aux mille parfums » de Mim (avec Charlène Darling)

Mim et Charlene Darling
Mim et Charlene Darling

Second épisode des aventures de Charlene Darling et Mim après le très beau Saint Guidon, paru il y trois ans et dans lequel le garçon avait joué un grand rôle (« réalisation ») : c’est au tour de ce dernier de signer un album sur le même label, a1000p. L’aspect éthéré et vénéneux du premier essai laisse place à un univers plus minéral, plus bizarre aussi. Si Charlene Darling s’amusait à faire un album pop, du moins s’en approcher, Mim, lui déjoue : liberté dans les chants qui semblent improvisés dans l’instant, frontalité du vocabulaire (« C’est à fond que je t’aime ») et diversité des thèmes abordés. Mais on ne perd rien au change : des petits miracles se passent dans les petites constructions qui font fi des règles habituelles du son. Continuer la lecture de « Avant-première : « L’amour aux mille parfums » de Mim (avec Charlène Darling) »

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Valentina Magaletti & Yves Chaudouët, Batterie Fragile (Un Je-Ne-Sais-Quoi)

1. La semaine dernière, je suis allé voir Institutrice en concert. Eric Bentz et Jean-Baptiste Geoffroy, tous les deux pensionnaires de la bruyante Colonie de Vacances, développent un jeu exigeant de percussions sur toutes sortes de bols, casseroles et accessoires en métal étendus devant eux sur un tapis de mousse. A la fois ludique et sportif, leur duel consiste à déclencher leurs motifs dans des décharges extatiques, à l’unisson imparfait (j’imagine) qui malgré leur virtuosité crée ces micro décalages où se loge ce qu’on aime bien : accidents, imperfections, anfractuosités dans lesquels se loge notre imaginaire (bien aidé aussi par leur dispositif de retraitement électronique en direct, mais je laisse ça de côté aujourd’hui). Le bon gros cliché du voyage nous attend en embuscade, certes, mais tant pis : de l’Afrique à l’Indonésie, on est bien obligés de se laisser attraper par ce qui est irréductible à la musique, le rythme qui nous possède le reptilien en deux coups de cuiller à pot (au sens littéral ici). Continuer la lecture de « Valentina Magaletti & Yves Chaudouët, Batterie Fragile (Un Je-Ne-Sais-Quoi) »

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Selectorama : Roméo Poirier

Romeo Poirier / Photo : Anna De Smet
Romeo Poirier / Photo : Anna De Smet

Rentrer dans le Living Room de Roméo Poirier qui sort là son troisième LP (après Hotel Nota, chroniqué ici), c’est se poser dans un monde imaginaire où l’on croit entendre des oiseaux exotiques, des craquements d’arbres, une jungle équatoriale recréée de façon électronique.  Allongé au bord de cette rivière de sons, on retrouve le goût d’écouter, de tendre l’oreille au moindre détail savamment mis en scène par le musicien. A la métaphore guerrière qui voudrait qu’on suive un compagnon coûte que coûte, on préfèrera celle de la métaphore du voyage : on aura toujours envie d’être dans les pas de Roméo Poirier, partout où il va, depuis qu’on le connaît, dans toutes les contrées qu’il explore, de l’avant-pop de Roméo & Sarah à son travail solo dont les géographies électroniques s’étendent sans se presser, sans trop se dévoiler non plus. La preuve dans un Selectorama où chaque mot semble soupesé, non sans humour d’ailleurs. Continuer la lecture de « Selectorama : Roméo Poirier »

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La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est de Guillaume Marietta et Nicolas Drolc (Les Films Furax)

GTAIE / Photo : Guillaume Marietta
GTAIE / Photo : Guillaume Marietta

J’ai longtemps hésité cinq minutes avant de me décider à écrire sur le sujet qui nous rassemble, chères lectrices et chers lecteurs.

Longtemps, parce qu’on ne va pas faire semblant, je suis passé complètement à côté d’un phénomène qui pourtant se déroulait – en partie – dans les rues en bas de chez moi, à Strasbourg. Mais, j’avais une excuse, le nez dans le guidon, en ces belles années là, j’étais occupé par le label Herzfeld, plus formel, ouvertement pop, et assez éloigné dans l’esprit, du bouillon de culture de la Triple Alliance. Continuer la lecture de « La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est de Guillaume Marietta et Nicolas Drolc (Les Films Furax) »

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« Je suis à découvert », extrait du nouvel album de Primevère, en duo avec Françoiz Breut

La dernière fois qu’on a croisé Françoiz Breut sur scène, c’était au printemps à Colmar et à Metz pour Aucunes funérailles à l’horizon, soirées consacrées au label Lithium. Elle s’était illustrée en croisant le fer avec Calvin Keller, du groupe Sinaïve, pour un duo de toute beauté plein de symboles : reprenant à deux voix et guitare électrique L’écho de Dominique A, Françoiz avait porté très haut l’émotion du public présent. C’est à nouveau en très bonne compagnie qu’on la retrouve cet automne, avec un autre garçon talentueux, Romain, qui sous le nom de Primevère s’avance avec un bel album à venir, illuminé par des chansons hypnotiques, obsédantes, qui tournoient ou par des ballades toutes en douceur. En exclusivité, le duo Primevère / Françoiz Breut donc, chanson squelettique dans le cadre duquel excelle cette dernière, agile comme une gazelle sur des terres arides. Continuer la lecture de « « Je suis à découvert », extrait du nouvel album de Primevère, en duo avec Françoiz Breut »